Une femme marche dans une pharmacie

Équité et système de couverture des médicaments au Canada

Lauren Fischer  | 23 mars 2018

Tags |  Politique

Lauren Fischer, vice-présidente, Affaires de l’entreprise de Lilly Canada, est l’auteure invitée du billet d’aujourd’hui.

Comment pouvons-nous faire en sorte que tous les Canadiens aient accès aux médicaments dont ils ont besoin sans que l’abordabilité soit un obstacle?

Une des pièces cruciales du puzzle est le prix des médicaments. Nous avons déjà examiné cette question sous d’autres angles : nous avons parlé des changements proposés par Santé Canada au système d’établissement des prix des médicaments, et de la différence entre les notions de prix, de valeur, de rapport coût-efficacité et d’abordabilité. Dans le cadre du débat sur l’établissement des prix, nous devons poser une série de questions supplémentaires : comment fonctionne le système canadien de couverture des médicaments? Qu’est-ce que « l’attribution préférentielle » des ressources? Comment pouvons-nous maintenir l’héritage canadien en matière de soins de santé équitables?

Système de couverture des médicaments au Canada

Commençons par brosser un aperçu du système de couverture des médicaments d’ordonnance au Canada. Au fil des ans, notre système a connu une croissance interne afin de s’adapter à l’évolution des besoins. Le système actuel englobe les régimes publics d’assurance-médicaments fédéral et provinciaux (financés par les gouvernements) et les régimes privés. Chacun de ces types de régimes joue un rôle unique. Par exemple, le régime public se caractérise par un solide cadre d’évaluation de la valeur et de négociation qui tient compte des listes de médicaments qui bénéficient aux populations les plus vulnérables, notamment les personnes âgées, les assistés sociaux et les personnes devant assumer des coûts de médicaments importants par rapport à leur revenu. De leur côté, les assureurs privés offrent à leurs membres une couverture spécialement conçue pour répondre à leurs besoins, par l’entremise des employeurs en grande partie.

En octobre 2017, le ministre de la Santé a publié une lettre de mandat indiquant que le Canada est « engagé à fournir une aide plus directe aux personnes dans le besoin en donnant moins aux plus riches ». Ce concept est le fondement de l’équité. Les ressources du pays en matière de couverture des médicaments étant limitées, il est logique d’en attribuer de manière préférentielle le plus grand nombre possible aux personnes qui en ont le plus besoin.

Cette pratique est aussi en vigueur dans d’autres secteurs gouvernementaux. Par exemple, la politique de financement de l’éducation du gouvernement de l’Ontario prévoit un soutien préférentiel aux familles moins nanties.

Travailler ensemble pour soutenir en priorité les personnes qui en ont le plus besoin

Nous partageons le 
désir du gouvernement de soutenir de manière préférentielle les personnes qui en ont le plus besoin. Les fabricants de médicaments négocient des réductions de prix considérables dans le cadre des régimes d’assurance-médicaments financés par les gouvernements. Ces réductions s’élèvent en fait à 1,3 milliard $ chaque année. Nous le faisons afin d’aider les gouvernements à optimiser les ressources soutenant la santé des citoyens les plus vulnérables, qu’ils ont choisi de couvrir.

Les budgets gouvernementaux étant fixes, il est crucial que les fonds soient utilisés efficacement. Le gouvernement fédéral assume 70 % de l’ensemble des coûts de santé au Canada, soutenant un grand nombre de personnes et de familles. L’attribution préférentielle des ressources au profit des Canadiens dans le besoin est importante; tout changement apporté aux politiques doit tenir compte de cet objectif.

Santé Canada propose de modifier la façon dont le prix des médicaments est réglementé. Les changements proposés permettraient de réduire le prix d’achat des médicaments novateurs. Comme il existe déjà des réductions considérables dans les régimes d’assurance-médicaments financés par les gouvernements, ces changements de politique bénéficieraient aux régimes privés. Les changements pourraient ainsi aller à l’encontre du principe d’équité en risquant de compromettre la capacité des régimes gouvernementaux à offrir la meilleure valeur possible aux populations les plus vulnérables.

Nous soutenons l’objectif du gouvernement visant à améliorer l’abordabilité, l’accessibilité et l’usage approprié des médicaments d’ordonnance. Toutefois, nous craignons qu’avec les changements proposés, il ne soit pas possible de réaliser des progrès significatifs quant à l’atteinte de ces objectifs importants. Nous croyons qu’il existe différentes façons de continuer à faire fonctionner notre système de soins de santé au profit des Canadiens et nous souhaitons fortement engager avec le gouvernement et les intervenants un dialogue axé sur les données probantes à propos de solutions possibles.